jeudi 8 octobre 2020

Secousse 24

 

Alias Balzac quand il se choisit un nom de fille.

Résumé : A cause de ce foutu chien qui gueule je suis obligé de hurler : "SILENCE ! "

Ces trois crimes élégamment conçus par Luc, Jean et Marc traçaient une voie certes pentue mais non dénuée d'un certain charme. Après tout, les salauds sont des fumiers et en plus ils ont mauvaise haleine.

Le message de Marie proposait alors une récréation : dans l'armoire grise de la rédaction, sous une pile de vieux magazines « le Chasseur Français », Balthazar trouva une vieille cassette audio. Cette cassette arborait encore la publicité de l'époque « Un bon son c'est mieux, un bon son s'achète chez Matthieu, rue Porte de Paris, à Thouars ». Il est vrai que ce Matthieu, membre de la bande était commerçant, il vendait du matériel hi-fi et de l'électroménager. Il ne fut pas difficile de trouver un lecteur (nous étions dans les années 80) pour cette cassette ancienne. 

C'est Marie qui parlait au début :

- « Ah, ah, ah. Que celui ou celle qui m'écoute sache que nous avons bu plus que de raison. Tout le groupe est là au complet. Nous dégustons un fameux Champagne signé Bourgeois-Diaz. Nous jouons à un jeu qui n'a pas de perdant. Il faut que chacun raconte un truc vrai mais très étonnant, ou très drôle, ou très… ce qu'on veut, en fait ! Alors je commence, je vais vous parler de Stanley Milgram. (On entendait autour les autres faire "Chut ! Chut ! Marie nous cause d'un inconnu"). Stanley est né à New-York en 1933. Au début des années 60, il y a environ dix ans, alors qu'il était psychologue, il a mené une expérience. Il a placé un cobaye sous des électrodes, appelons-le X, et en face un autre personnage choisi au hasard, appelons-le Y. Y lit une liste de mots. X doit réciter les mots dans l'ordre, s'il se trompe, Y lui envoie une décharge électrique de plus en plus forte au fur et à mesure que les erreurs sont commises. X sous l'effet des chocs répétés hurle, supplie d'arrêter. Y hésite au bout d'un moment. Un médecin intervient alors et rassure Y, il lui dit : « Il faut continuer l'expérience. J'en assume la responsabilité ». 62,5 % des tortionnaires envoient 450 volts !!! En réalité le cobaye Y est un comédien qui simule l'électrocution. L'expérience porte non sur la faculté d'apprendre sous la contrainte mais sur l'obéissance et la soumission à l'autorité. 62,5 % de gens très ordinaires s'avèrent être des tortionnaires !!! On ne manque pas de cibles.

 Une salve d'applaudissements salua le discours de Marie. 

- Je veux bien tenter d'enchaîner, dit Jean. Mais je ne serai pas aussi brillant que Marie. Voici deux anecdotes littéraires : Balzac a été poursuivi toute sa vie par les créanciers. Il avait été tenté par les affaires et avait perdu beaucoup d'argent, il avait laissé d'énormes factures impayées. Alors pour continuer d'écrire et se mettre à l'abri des rapaces il louait à Paris des appartements avec une entrée sur une rue et une sortie sur une autre pour s'échapper. Parfois même il louait sous un nom d'emprunt… un nom de jeune fille.  

Sur la cassette audio on entendait l'assemblée rire.

- Sinon, ajoutait Jean, je peux vous dire que Zola dans « La conquête de Plassans » se trompe deux fois. D'abord il écrit « cette grande bête de Saturnin » or il s'agit de Séverin. Ensuite il écrit : « un après-midi, l'aînée des demoiselles Rastoil, Aurélie... » Or ce n'est pas Aurélie car l'aînée se prénomme Angéline. On peut en conclure que Zola ne buvait pas que du café comme moi et Balzac, ou alors, comme moi il buvait du café rehaussé d'eau-devie.

- A la tienne ! A boire ! scandait la bande.

( A suivre)

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