Le cher poète disait aussi « Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festin où s'ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient. Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux. -Et je l'ai trouvée amère. -Et je l'ai injuriée. ». J'avais cité le poéte sans me souvenir de son nom, ni même de son poème. Il se passait une chose extraordinaire : des morceaux passaient à la dérive dans ma mémoire pourtant désertée. Nous avions bu jusqu'alors des alcools. Mais des liqueurs patiemment égoutées, faiblement brutale. Elles nous contentaient néanmoins. Or les deux bouteilles trouvées après l' effondrement de la paroi venaient du monde ancien et leur puissance était énorme. Nous les avons bues l'une après l'autre, car il y a bien longtemps que nous n'économisions plus nos joies, sachant que la vie n'est rien du tout et qu'elle est furieusement capricieuse. Je l'ai dit, nous étions sauvages et comme tels nous prenions dans l'instant la moindre herbe comestible, la plus fine tranche carnée qui restait, le rayon de soleil en hiver.
Donc nous avons bu le contenu de ces deux bouteilles. Et nous avons sombré. Au réveil il faisait nuit noire. Je suis sorti, Amogh ronflait. J'ai regardé le ciel, Orion était au-dessus, et pour la première fois cette constellation me fut familière... incompréhensiblement. Et puis j'ai redit à haute voix cette étrange incantation :
« Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festin où s'ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient. Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux. -Et je l'ai trouvée amère. -Et je l'ai injuriée. ». Je me suis mis à trembler, à quoi pouvait bien servir ces mots . Soudain il y en eut d'autres qui me submergèrent
« Orion C'est mon étoile. Elle a la forme d'une main. C'est ma main montée au ciel »
Et des larmes me mouillèrent le visage ou bien était-ce la pluie qui s'était remise à tomber ? C'était la pluie, mais pas seulement.
(A SUIVRE...)
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