Résumé : Arrive-t-il au diable d'être triste ?
Balthazar trouva la coupure désignée par Marie dans le dossier « faits divers » de la rédaction. Il était question de deux vieux garçons qui vivaient chacun dans leur maison, côte à côte. Ces deux vieux imbéciles se détestaient. Le moindre marron qui, venant de l'arbre de l'un tombait dans le jardin de l'autre, suscitait des menaces :
_ Salaud garde tes marrons!
_ Espèce de fumier un marron dans ta sale gueule ne peut que te rendre
moins laid.
_ Un jour j'aurai ta peau, fils de merde !
_ Je t'aurai tué avant, rat puant !
Et cela n'en finissait jamais. Cela dura des décennies. Dans le village on avait fini par en rire, sauf quand ces deux là se retrouvaient par hasard dans l'unique bistro. Les injures, annonçaient la bagarre et les menaces de mort mutuelles. Marcel le patron était obligé de virer l'un par la porte et l'autre par la cuisine. Ce qui envenimait les querelles :
_ Bien sûûûûûr il sort par la grande porte et moi par l'office des domestiques.
_ Ta gueule, la dernière fois c'était l'inverse ! Vous êtes tellement cons que je suis obligé de veiller à ce genre de finesse de merde ! Hurlait le patron hors de lui et si l'on va par là hors de chez lui puisqu'il était dans la cour. Bref… Personne ne fut surpris lorsque Gaston fut trouvé abattu, chez lui, une balle dans la tête, une balle de 8mm. On ne retrouva pas le revolver qui avait dû finir dans la rivière voisine baptisée du joli nom de Dive. On accusa bien sûr Michel le voisin qui haïssait Gaston, qui lui avait promis pendant trente ans de mettre une balle dans sa putain de cervelle de con.
Michel resta prostré pendant son procès, seul son regard trahissait son dégoût. Il fut condamné à 30 ans parce qu'à l'évidence c'était un assassinat et non un banal meurtre. En l'occurrence la préméditation avait mûri durant des décennies.
Le temps passa un peu. Gaston mort n'ayant pas d'héritier, sa masure finit pas être vendue aux enchères à la bougie. Elle fut achetée par un jeune couple tellement amoureux qu'ils s'embrassaient sans cesse, et levaient la main sans cesse aussi. Le commissaire priseur croyait qu'elle enchérissait sur lui et lui sur elle, la masure atteignit des sommes folles. Ils enchérissaient l'un sur l'autre parce qu'il se chérissaient ... C'est pourtant vrai que l'amour rend aveugle. Bref l'on s'aperçut de la bévue et l'on constata qu'ils étaient en fait les seuls acheteurs. Et on repris sans bisou la vente, et sans que le commissaire priseur fisse la moue (c'était un chic type). Les amoureux devinrent propriétaires pour quelques sous.
( A suivre)