L'atmosphère incitait à s'acagnarder, pourtant mille tâches nous attendaient. J'entrepris la réparation de la toiture du « cul de loup » puisque c'est le nom qui, d'emblée, avait surgi dans la mémoire pourtant repliée d' Amogh. Nous n'étions pas des aliborons, nous savions mille choses utiles à notre survie, mais nous avions oublié les usages anciens, les modes du temps passé, nous ne savions pas d'où nous venions, et où il nous fallait aller. Ai-je dit que nous avions perdu la mémoire ? Je ne sais plus... Ici et maintenant était notre code. Et nous puisions dans l'instant mille joies fines et gracieuses. Pas d'hier et pas de demain. La vie en somme, dans toutes ses palpitations, ses souffles, ses soupirs et ses grimaces.
La toiture du cul de loup était construite de troncs de châtaigniers grossièrement ligaturés avec de l'écorce de bouleau tressée.
Des perches fixées en travers complétaient l'armature. Dessus une grosse épaisseur de fougère. La fougère coupée sous la bonne lune et séchée au soleil sous un vent d'Est est un petit miracle de la nature, elle ne pourrit pas.
Les trous qui avaient généreusement partagé la pluie avec nous avaient été provoqués par des branches tombées, et le vent furieux d'hiver.
J'entrepris donc de consolider la charpente que j'avais entièrement découverte. Il fallut aussi faucher de la fougère et attendre que le soleil accomplisse son labeur. Amogh était parti chasser depuis plusieurs jours. Je dormais dehors. Dans un roseau j'avais taillé une longue flûte et d'anciens airs me revenaient sous les doigts. Au crépuscule cette musique se mélangeait au souffle du vent. Et je crois bien qu'alors, j'étais heureux.
(A suivre lundi)
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