dimanche 20 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (10)

 


Suite possible Caroline se désennuie et trouve l'âme sœur.

 

Revenons à ce moment où Caroline pose sa main sur la vitre du parloir. Elle venue voir Robert avant son exécution ( rappel : « Derrière la vitre du parloir elle posa sa main, Robert put y lire ce message.

« Pauvre nouille c'est moi la criminelle, et merci pour les lingots »

Robert baissa la tête, anéanti, de toute façon elle allait bientôt ne plus lui servir, sa tête.)

Il n'y avait pas de caméra et personne ne sut jamais que Caroline s'était désennuyée. Elle croisa à bord d'un paquebot de luxe en partance pour les îles un gars plutôt beau gosse avec une balafre ce qui lui donnait un air mystérieux et charmant. Ce fut le coup de foudre. Et comme le hasard ne fait rien sans coïncidence, une nuit de tendresse elle lui confia son secret. Alors il sourit et avec un regard plein d'amour l'embrassa voluptueusement. Puis il murmura : moi aussi je suis un tueur de circonstance, comme ça, pour passer le temps. Il s'appelait Moïse. D'une belle voix grave et avec un sourire charmeur il lui murmura son secret à l'oreille.

Moïse était riche de naissance et il s'ennuyait, alors il entreprit de tuer pour se délasser. « Comme toi mon amour pour pimenté mon quotidien. Au début, j'ai tué deux personnes un jour en Sologne ».

(A suivre)

samedi 19 octobre 2024

La phrase romanesque

Je mange volontiers mes mots, surtout ceux qui évoquent la pâtisserie. 

(Balthazar Forcalquier)



jeudi 17 octobre 2024

J'ai de la chance j'habite à Thouars

 

(Photo Sébastien Bertin)
 Comme on sait un petit gars irlandais, barbu et coquin, ( on l'appelle leprechaun ) habillé en vert conserve un magot dans un chaudron caché au pied d'un arc en ciel.

Ici tout est pittoresque. Même un arc en ciel devient un spectacle divertissant. Et bien sûr au fond de la rue on trouve un trésor : le centre de Thouars.

Les chanceux habitent en  Thouarsais  !

Le roi n'est pas notre cousin.

mercredi 16 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (9)

 


Caroline avait vendu à un négociant en or la moitié des lingots de la vieille. Elle repartit avec une valise pleine de gros billet. Elle s'offrit un abonnement à vie pour des croisières lointaines en première classe. Chaque soir elle buvait un cocktail de couleur bleue en compagnie d'un capitaine toujours charmant

Caroline se réveilla, elle avait rêvé merveilleusement de son avenir, mais la réalité était moins douce. Une clef manœuvra la serrure de sa cellule. On venait la chercher pour lui passer un nœud coulant autour du cou. Caroline avait commis une erreur aux effets considérables. L'ennui serait bientôt chassé à vie.


En appuyant sa main sur la vitre du parloir, elle n'avait pas imaginé une seconde qu'une caméra filmait les entretiens des visites en prison. Pas de micro (les conversations restaient privées) mais les gardiens surveillaient que rien ne passe du côté des geôles. Ils avaient lu le message. Une perquisition à son domicile permit de retrouver une partie des lingots. Robert fut libéré avec des excuses et une petite indemnité. Un journaliste vint le voir pour écrire son histoire. Le livre eut beaucoup de succès et fit la fortune de ce bon Robert. Chaque soir, à bord d'un bateau de luxe, il buvait un cocktail de couleur bleue en belle compagnie.


Ce dernier épisode a été écrit pour que la morale soit sauve. Mais on peut très bien ne pas en tenir compte, le lecteur est libre de ses choix.

FIN ( lundi une suite possible)


mardi 15 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (8)

 




Au fil de protestations effrayées et vaines, Robert tenta de se défendre stupidement :

  • « Mais je suis innocent. Pour le prouver allez voir dans la cave de la mamie, il y a une caisse de vin pleine de lingots … Si c'était moi le tueur je les aurais pris . »

Justement l'or n'y était plus !

Tout cela mena Robert au tribunal «  ne niez pas grondait l'avocat général, on a trouvé une enveloppe à votre nom perdue dans le jardin de la victime lors de votre fuite, et son sang sur votre cravate, dans votre poubelle . Et comme par hasard rien dans la cave !» Le tribunal conduisit Robert vers l'échafaud.

Avant qu'il soit pendu, Caroline obtint l'autorisation de lui rendre visite. Un crime parfait mérite toujours d'être connu. Derrière la vitre du parloir elle posa sa main, Robert put y lire ce message.

« Pauvre nouille c'est moi la criminelle, et merci pour les lingots »

Robert baissa la tête, anéanti, de toute façon elle allait bientôt ne plus lui servir, sa tête.

(A suivre)

lundi 14 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (7)

 

Le lendemain, un mercredi, le petit-fils de la vieille passa comme chaque semaine ( le même jour, à la même heure) faire une bise à la rombière. Il investissait dans l'avenir, se disant qu'un bécot hebdomadaire, lui ouvrirait peut-être un jour la voie de la fortune en héritage … allez savoir, des fois que la marâtre le couche dans son testament.

Il découvrit le crime, la gorge tailladée, le sang plein les draps. Il appela les pompiers et la police. L'enquête fut rondement menée. On trouva devant la porte de la victime l'enveloppe avec l'adresse du présumé meurtrier. On débarqua chez Robert, on fouilla son domicile de la cave au grenier. Un inspecteur au nez fin se pencha sur la poubelle de la maison où il trouva, sous des pots de yaourt vides et des emballages de jambon, une cravate pleine de sang. Le laboratoire releva sur la cravate l'ADN de Robert et celui du sang de la victime.

( A suivre)

dimanche 13 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (6)

 


Caroline ne s'ennuyait plus du tout. Elle peaufina son projet et passa à l'acte.

Une nuit sans lune, c'était un mardi à deux heures du matin, équipée d'une pince monseigneur elle força sans bruit la porte de la vieille dame revêche qui ronflait si fort qu'on l'entendait derrière les volets. Caroline accomplit alors ce qui occupait son imagination depuis des mois. Elle égorgea la vieille qui mourut alors qu'elle se rêvait jeune dans un hôtel de luxe buvant un cocktail de couleur bleue. Avec ses gants de caoutchouc Caroline sortit la cravate de sa boite et l'aspergea avec le sang de la malheureuse victime. Puis elle glissa la cravate dans un sac en plastique. Elle passa par la cave et récupéra les lingots d'or exactement où Robert avait dit les avoir trouvés. En repoussant la porte derrière elle, elle laissa tomber dans le jardin l'enveloppe froissée qui portait le nom de Robert.

(A suivre)



samedi 12 octobre 2024

La phrase romanesque

 


Il ne faut pas croire un mot de ce que je dis ... même quand je dis cela !

(Balthazar Forcalquier)


vendredi 11 octobre 2024

jeudi 10 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (5)

 


Robert rapporta le lendemain la boite dans laquelle avait été pliée la cravate offerte.

_ « Je l'ai portée longtemps comme tu m'as dit, elle est un peu froissée, je ne l'ai pas repassée. Je voudrais une anguille piégée dans une nasse si tu peux broder cela.»

_ « C'est parfait » répondit Caroline avec un petit sourire en coin. « Elle ajouta, au fait tu vas toujours rendre visite à la grand-mère au bout de la rue ? »

_ « Oui toutes les semaines, elle n'est pas commode mais je crois qu'elle m'aime bien. »

_ « On raconte qu'elle est riche. »

_ « Chut, ne le répète pas mais c'est vrai. Un jour qu'elle m'a demandé de remonter une bouteille de sa cave où il y a un foutoir sans nom, j'ai renversé une caisse de Nicolas Reau … dedans il y avait six lingots d'or. J'ai tout remis en place. Chut ne le dis à personne. »

En souriant Caroline répondit

_ « Je serai muette comme une tombe. »

( A suivre lundi )



J'ai de la chance j'habite en Thouarsais

 

A Saint-Jean-de-Thouars, le Thouet est tendre et coquin, il caresse les berges gentiment avec volupté. Un grand monsieur vient de temps en temps avec un tout petit chien jeter sur la berge des morceaux de pain et du maïs. Il dépose ses cadeaux et repart sans un mot. Les canards sont  épatés. Tout est simple et sans manière. C'est très gentil, et très doux.

Les chanceux habitent en  Thouarsais  !

Le roi n'est pas notre cousin.

mercredi 9 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (4)

 




Il retira le papier cadeau, la cravate était belle dans sa boîte, l'étoffe était en fausse soie blanche. Impeccable ! Il était heureux.

Caroline présenta son projet

« Quand tu seras chez toi, tu ouvriras la boite et tu porteras ta cravate, longtemps dans ta maison, même au lit. Ensuite, quand elle sera bien faite à ton cou, tu la remettras dans sa boite et tu me la rapporteras, je te broderai dessus le motif que tu auras choisi : un poisson, un papillon, un oiseau … ce que tu veux, réfléchis. »

Robert était aux anges.

Pendant plusieurs semaines Caroline se leva très tôt pour aller fouiller dans l'obscurité la poubelle de Robert avant le passage de la benne. Un jour enfin elle trouva sous ses gants de caoutchouc ce qu'elle convoitait : une enveloppe avec dessus, naturellement, l'adresse de Robert.

( A suivre )



mardi 8 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (3)

 


Au bout de quelques jours une idée noire s'installa et prospéra dans son esprit. Très vite elle retrouva son dynamisme.

Voilà cette singulière histoire :

Caroline avait un voisin gentil, solitaire comme elle, mais totalement dénué de charme. A part raconter sa dernière partie de pêche, ou le changement d'une roue sur son auto, Robert n'avait jamais rien à dire.

La cible ce serait lui : Robert.

Elle l'invita à un apéro. Robert accepta avec joie, c'était son anniversaire. Caroline lui avait préparé un gentil cadeau : une cravate. Bon … ce présent était original parce que Robert, cantonnier, avait rarement l'occasion de porter une cravate.

( A suivre)


lundi 7 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (2)



Ses collègues des autres services se demandaient comment cela devait être chez elle. « Parfait », «  super impeccable » , « même la poussière doit être rangée » ajoutait en riant le secrétaire général. Ces qualités effrayaient les garçons qui redoutaient de courtiser une fille aussi parfaite : «  je suis sûr que chez elle il y a plusieurs paires de pantoufles selon l'usage dans chacune des pièces … Si cela se trouve elle a même une paire de pantoufles exclusivement vouée au lit ! »

Caroline était donc seule, très seule.

Si elle était parvenue à chasser l'ennui jusqu’alors dans les moindres recoins de sa vie, un beau jour, tout étant fait, vérifié et revérifié elle plongea dans la perplexité suivie d'une cruelle mélancolie : « que puis-je faire maintenant ? »


dimanche 6 octobre 2024

Quand Caroline se désennuie (1)

 Feuilleton policier  en neuf épisodes.


 1

Caroline était archiviste municipale. L'archive demande du calme, de la lenteur, le port de pantoufles l'hiver quand la neige caresse la vitre du bureau. Caroline était jolie, impétueuse, vive, elle redoutait l'ennui plus que tout. Pendant des années elle avait tué le temps en classant, rangeant, agençant, organisant, par ordre alphabétique, par sujets, par thèmes, par numéros, par dates, les dossiers, les fiches, les cartes, les notes. Tout était parfait au bout de quelques années. Ses supérieurs étaient admiratifs. Exemple :

« Caroline, au siècle dernier un terrassement a été entrepris dans la rue principale pour faire passer le gaz, avez-vous un document là-dessus ? »

- « Bien sûr monsieur je regarde. »

Et huit minutes plus tard un vieux dossier aux couleurs ternes arrivait sur le bureau du maire qui lui adressait un compliment sincère.

( A suivre )

samedi 5 octobre 2024

La phrase romanesque

 Lun des métiers les plus dangereux : homme sandwich chez les anthropophages.

( Balthazar Forcalquier)



vendredi 4 octobre 2024

jeudi 3 octobre 2024

Lu dans la presse locale

 


Septembre 2850, les vendanges sont difficiles, la chaleur a été considérable cet été et les raisins géants (introduits il y a 400 ans) ont séché sur pied. Heureusement une nouvelle technique a été employée en Thouarsais : du jus opportunément stocké l'an dernier est injecté dans les baies. Le raisin retrouve sa belle allure de jadis. La cuvée sera bonne à n'en pas douter. Igor Reau descendant d'un très ancien vigneron du secteur l'affirme : "il sera du niveau de 2847". Une bonne nouvelle qui réjouit les amateurs.
Les chanceux habitent en Thouarsais.
Le roi n'est pas notre cousin.

mercredi 2 octobre 2024

Histoire de dire

 



Christophe Colomb n'a jamais pensé qu'il avait abordé un nouveau continent. Il a toujours été certain d'avoir trouvé des rivages chinois. Il pensait que la terre avait une forme de poire et qu'à son sommet était le paradis. Ce n'est pas faux d'une certaine manière car la poire en haut est souvent d'un goût divin.

mardi 1 octobre 2024

"Mon amour . Je t'écris ces quelques mots pour te dire ..."


A ceux qui sont tristes parce qu'ils ne reçoivent que très rarement du courrier, à part quelques cartes postales toujours rédigées de la même manière : " souvenirs de Pornic. Bises", à ceux là je propose une boite aux lettres. Dedans tout ce qu'il faut pour écrire une belle et longue lettre d'amour.

 

lundi 30 septembre 2024

Invention littéraire



Je me dis parfois (à jeun) qu'il serait intéressant d'enrichir l'alphabet de quelques lettres nouvelles comme la voyelle

 ou la consonne 

Par exemple :


On pourrait dire "JE T'AIME"
ce qui voudrait dire "je t'aime oui mais follement". 
Chacun aurait la possibilité de choisir deux lettres, à chacun de l'inventer. La langue serait elle plus riche ?

 

dimanche 29 septembre 2024

Heureux ceux qui en ont


Avoir les pieds mandarines est une chance. Ils ne sentent jamais le vieux fromage, mais le cointreau,  quand on n'a pas eu le temps de les laver.

 

samedi 28 septembre 2024

La phrase romanesque

 C'est bizarre comme 8h32  s'obstine à revenir tous les jours à la même heure.

(Balthazar Forcalquier)




vendredi 27 septembre 2024

jeudi 26 septembre 2024

J'ai de la chance j'habite en Thouarsais

 


Chaque famille a, ici, sa recette d'épine. C'est un apéro à base de pousse printanière d'épine noire, de vin, de gnôle, de sucre et de ... secrets. On laisse macérer un peu. Et quand les doux amers se développent on met en bouteille. J'en ai bu des dizaines jadis et la meilleure fut à Mauzé-Thouarsais.

Vous trouverez sur internet des "recettes d'épine noire" et, dès que possible, faites vous des amis pour soulever des mystères d'une rare finesse.

 Les chanceux habitent en  Thouarsais  !

Le roi n'est pas notre cousin.

mercredi 25 septembre 2024

Un bol de lait créole (14 et fin)

 


Le paysage devient, au fil du chemin parcouru, un complice délicieux. Il partage tout, les herbes caressent les nuques, des fleurs énormes libèrent des fragrances capiteuses qui vous enveloppent, cela s'appelle le bol de lait créole. Il envoûte comme une drogue, comme une bouffée de cet opium rare qu'on ne peut fumer qu'en Chine dans le port de Ningbo par exemple, dans les sous-sols des salons de thé crasseux. Je comprends alors que je me transforme en une sorte de bois flottant. Je plonge et me laisse dériver, loin du canot qui s'est perdu déjà dans le marigot après que le navire s'est ensablé il y a longtemps.

C'est ainsi que je suis devenu pur indien, quand une femme indienne nue et minuscule m'a recueilli sur un banc de sable où j'agonisais, dévoré par des sangsues géantes.

Depuis je suis totalement heureux, papa, dans un paradis de branches. Il m'arrive encore de boire parfois de l'iboga amer et de me transformer en sève. Mais c'est de plus en plus rare puisque j'habite désormais le paradis avec mes enfants rieurs et mon épouse douce comme le bol de lait créole.

FIN

mardi 24 septembre 2024

Un bol de lait créole (13)

 



Les jours défilent mollement, je croise des cases abandonnées, des quais mangés par les vers. Ici tout est dévoré de haut en bas, tout est pourri, tout est mouillé deux ou trois fois par jour par des ondées d'une puissance antédiluvienne. Je me rappelle combien j'attendais ces tornades dans les forêts de Goyaz et du Mato Grosso. A la nuit tombée on pouvait voir – avec beaucoup, beaucoup de chance – une luminescence bleue sur les rives de la rivière des Aigrettes. Cette lumière magique était un diamant bleu. Une seule pierre offrait un an de vie somptueuse dans les hôtels cossus du Brésil. L'on y buvait des alcools rares dans les rires des femmes à collier de perles. Cela m'est arrivé une fois seulement. Je suis reparti à la quête des pierres phosphorescentes, mais en vain, j'ai fini en haillon, mangeant, pour survivre, des fourmis-termites grillées dans une case défoncée par les pluies.

( A suivre)


lundi 23 septembre 2024

Un bol de lait créole (12)

 


 

Le rouge des fleurs est celui du sang, le vert sans nuances, le noir d'ébène. J'aime cette franchise, ce pays est le mien. Pas de nankin, aubère, porracé, céladon, colombin, etc, toutes ces nuances inventées pour amollir les goûts, affadir les émotions. Ici c'est la vérité voluptueuse. J'aborde un môle pourri et j'entreprends de rebaptiser mon bateau, j'efface «  grand coeur » et j'écris à la place « VOLUPTUEUX ». Je sens que cela lui fait grand plaisir.

Un matin je croise un cargo perché tout en haut sur la cime des arbres. Je me souviens que Blaise Cendrars évoquait ces rencontres extravagantes. Il dit que ce sont les conséquences des crues soudaines et les masses d'eau qui déferlent sur la forêt jusqu'à la noyer sur des étendues considérables. Alors les marins abandonnent le vapeur et laisse à bord un seul homme en attendant la prochaine crue qui ramènera l'embarcation au port. Il peut patienter deux ou trois ans dans la solitude totale. Il ne devient pas fou, rien de semblable à l'océan que cette gigantesque étendue de feuilles. Il est heureux là haut, tranquille comme un oiseau, et bien souvent refuse de descendre si l'on vient le chercher. 

J'appelle, je joue de la corne de brume, mais rien ne bouge dans le ciel. Le marin n'est plus là ou bien il se cache.

(A suivre)

dimanche 22 septembre 2024

Un bol de lait créole (11)

 


Retour à bord du bateau, cap à l'ouest.

Je navigue plein ouest. Je pêche un peu des poissons énormes pleins d'épines mais très savoureux. Je m'ennuie et alors je souffre atrocement. L'ennui est mon pire ennemi. Je pioche dans la réserve de rhum et je m'effondre. Enfin j'aperçois devant un filet vert à l'horizon ! J'ai navigué plusieurs semaines il me semble.

Le rivage est une forêt bordée de palétuviers, et sillonnée de bras d'eau. Prudemment je mets le bateau en panne à quelques encablures et je vais explorer la mangrove avec le canot. C'est ici le poto-poto parfait. J'ai pied mais la boue remonte jusqu'au dessus des genoux, ça pue la vase équatoriale. Des coquilles d’huître me coupent la plante des pieds. Bizarrement la boue favorise la cautérisation des plaies, elles guérissent en cinq jours.

Demi-tour. En longeant la ligne verte je trouve enfin un fleuve capable d'accueillir mon bateau dont le tirant d'eau n'est pas trop important. La jungle klaxonne à mon passage, des singes hurleurs vocifèrent, des perroquets clabaudent, des jaguars silencieux me dévisagent avec arrogance, des anacondas lèchent l'air après mon passage. La lumière est d'une violence stupéfiante, elle ne fait pas dans la nuance, j'ai l'impression d'avoir absorbé une drogue.

( A suivre)

samedi 21 septembre 2024

jeudi 19 septembre 2024

Un bol de lait créole (10)

 


 

Suite et fin de la lettre (trouvée dans le bateau, cap à l'ouest).

« Quand il a fallu revenir chez les gens, dans les rues, et arpenter les places bruyantes ce fut étrange. Désormais souvent je croise la nostalgie, elle me caresse et m'embrasse. Je lui suis resté fidèle. Elle vient s'allonger à côté de moi la nuit quand tout le monde dort dans la maison. Le jasmin alors s'affole, enfin … il me semble. (...) Dans les taxis-brousse nous passions les frontières comme les autres, le corps las et le visage rouge de la poussière de latérite.

Nous traversions le monde sans avidité. Quelques rares lassitudes nous accablaient, mais c'était rare, car la curiosité n'est jamais rassasiée. Je me souviens aussi je suis bûcheron en Ariège ; des arbres ont basculé découvrant soudain des morceaux entiers de ciel. Des envies de se rouler nu dans les feuilles mortes me sautaient à la gorge, le sang a coulé aussi quand les jambes étaient mordues par les tronçonneuses, les haches étaient nos uniques compagnes ( elles au moins ne nous voulaient aucun mal contrairement aux tracteurs articulés qui rêvaient de verser avec avidité dans la pente des montagnes). Pas d'alcool, pas de drogue, la liberté passait avant tout et me charmait bien plus que n'importe quelle substance.  Tant pis, un jour je retournerai au guichet oblitérer des cartes à des voyageurs de première classe en partance pour Constantinople. »

( A suivre lundi)

mercredi 18 septembre 2024

Un bol de lait créole (8 et 9)

 


Suite de la lettre :

« Nous grimpions dans les trains surchargés en escaladant - en riant - les fenêtres.Notre ignorance naïve et pure était notre divine protection. Nous étions absous comme on pardonnait aux idiots du Moyen Age.

Il nous est arrivé d'avoir peur des fantômes au fond des puits, alors nous sommes partis le lendemain en riant . Des bateaux, des trains, des taxis brousse nous attendaient partout.

Un tour de cartes suffisait à nous fournir en cigarettes. Chez les toubabs ( les blancs) nous étions de somptueux pique-assiettes, prêts à rendre des services qui ne servaient à rien (en échange d'un repas, d'un lit, d'une semaine de gîte). Notre offre était toujours refusée, nous étions alors logés et nourris pour rien, pour un sourire.


 

« Mais cela c'était ensuite. Tout avait commencé bien avant dans les sables. Sous le soleil énorme et dans les nuits époustouflantes qui empêchaient de dormir en raison des étoiles jetées par poignées dans les cieux. Dans le silence nous buvions lentement du thé à la menthe avant d'aller chasser dans les oueds secs. Hélas, l'homme d'action est toujours violent et souvent un peu seul. L'amitié, là ou rien n'existe, est puissante, considérable. Ces pays nus ne trahissent pas comme ces jungles excessives qui pourrissent et empoisonnent ( j'en sais quelque chose! ). Ici rien devant, rien derrière. Nous mangions des galettes de farine cuites sur les pierres brûlantes. Nous nous allongions dans le silence. Dix ou douze paroles étaient prononcées chaque jour, pour signifier des besoins absolus, jamais pour un exprimer un sentiment ou un jugement. Seul l'imbécile bavarde dans le désert. 

(A suivre)

 

mardi 17 septembre 2024

Un bol de lait créole (7)

  


La lettre d'un inconnu trouvée sous un tiroir continuait ainsi :

« L'aventure pure. Voilà le mot qui m'a nourri longtemps. Alors j'ai foncé, je suis passé à travers mille interdits inconnus, aveugle, insoucieux et sans doute fou. C'est cette folie éperdue qui, d'une certaine manière, m'a protégé. Je dis « je », mais je devrais dire « nous », mon vieux pote et moi, car il était comme moi, mangeur de tout. Sans avoir le temps d'avoir peur.

En guise de passeport nous exprimions cette joie naïve qui suscite le sourire quand ce n'est pas l'amitié simple. Peut-être même – j'ose le dire – nous passions pour des héros. Nous empruntions une pirogue que personne n'aurait touchée, elle était protégée par des grigris, nous n'en savions rien, nous ne voyions rien. Nous foncions. Vite ! Vite ! Nous empruntions des chemins interdits en riant, « interdits pourquoi ? ."

(A suivre)

lundi 16 septembre 2024

Un bol de lait créole (6)

 


 

Heureux puis nostalgique ensuite, ce compagnon me manquait curieusement. J'y pense souvent encore. Mon grand-père dans sa jeunesse était soldat dans le Sahara, je ne l'ai pas connu mais ma mère disait qu'il aimait beaucoup partir seul au loin dans les dunes. Il était absent plusieurs semaines. Et revenait enfin, silencieux.

Un soir, collée sous un tiroir qui m'avait échappé j'ai trouvé une longue lettre sans signature. Je la relis souvent.

La voici : 

« J'ai toujours été une sorte de train fou qui fonçait droit devant, parfois absurdement. J'étais un mauvais voyou et un piètre cambrioleur. Ah ça ! Heureusement je n'avais pas l'audace absurde de ces gars de la bande à Jules Bonnot qui défouraillaient et abattaient en riant de pauvres employés. J'ai croisé Picasso (au bateau lavoir), il était insupportable et a tout volé aux masques africains. J'ai bu de l'absinthe avec Gauguin sur une goélette, il était doux et terrible. J'ai trinqué - en bordée - avec Blaise Cendrars ( Suisse il s'était engagé dans la Légion pour faire la guerre 14 aux côtés d’Apollinaire, « parce que disait-il la poésie c'est l'action »). C'est vrai. J'ai écrit trois fois à Julien Gracq, il m'a répondu deux fois. J'ai salué Vélasquez ( à Madrid) et Vermeer ( à La Haye) … ils m'ont souri...


( Asuivre)

dimanche 15 septembre 2024

Un bol de lait créole (5 suite de jeudi dernier)

  


Cap à l'ouest, encore et encore. Un soir j'ai vu au loin une frégate. Je me suis approché, personne à bord, en tout cas personne sur le pont, à part des singes qui sautaient d'un mât l'autre. J'ai viré de bord et repris mon cap à l'ouest. Un sentiment secret me disait que l'ouest était prometteur, riche en surprises peut-être heureuses. Dans le tiroir du bureau il y avait des livres de Blaise Cendrars, c'est une belle compagnie que celle-ci. Au bout d'un moment j'ai passé un cap et longé d'immenses plages qui bordaient des étendues de sable infinies. Très loin, parfois défilaient des chameaux. Un jour un homme me fit signe. Dans les jumelles je vis qu'il était vêtu comme un nomade du Sahara. J'hésitais … Je mis le navire en panne. Je n'avais vu personne depuis des mois. Avec la chaloupe je suis arrivé sur la rive. L'homme m'a souri, il s'est accroupi sur ses chevilles comme le font les gens d'ici. Il a allumé un petit feu, a posé dessus une casserole d'eau et des feuilles sèches. Dans deux verres colorés il a versé du thé brûlant. Sans un mot nous avons bu le délicieux breuvage. Puis l'homme s'est levé et a fait sa prière. Avant de partir, toujours silencieux il m'a donné un sachet de thé dans une pochette de tissu rouge. J'avais rien sur moi qu'une montre, je l'ai tendue. Il l'a prise et regardé longtemps, l'a glissée dans une longue poche suspendue à son cou puis a tourné les talons, appelant son chameau par de curieux et longs beuglements. Je suis retourné à bord.

(Suite demain)

 

samedi 14 septembre 2024

vendredi 13 septembre 2024

jeudi 12 septembre 2024

Ici Thouars

 Samedi dernier la Shaapt (société d'histoire d'archéologie et des arts du pays thouarsais) a initié une belle chose : célébrer la liberté que Thouars a savouré le 2 septembre 1944, le maire et les responsables de la Shaapt ont été nets et précis lors de la cérémonie. Extrait de l'article de la NR








mercredi 11 septembre 2024

Un bol de lait créole (4)

 

(Gonsalvez)

Le moteur est parti au quart de tour, cap à l'Ouest. Quelques rares mouettes heureuses de croiser un humain m'ont accompagné un bon moment. Pour les remercier je leur ai jeté du pain. Il y avait du pain et de la confiture de framboise dans un placard. « Le roi n'était pas mon cousin » comme j'aimais à le dire jadis au temps heureux dans une campagne verte riche en lait et parfums fermiers.

Je ne sais pas où j'étais et je ne sais pas où j'allais. Le compas du bord était capricieux. Plein ouest, ça c'est facile quand on voit le soleil. Une tempête est arrivée, elle était furieuse, comme jalouse de mon minuscule bonheur. J'ai jeté l'ancre flottante, la proue face aux vagues déferlantes et je me suis enfermé dans la cabine, allongé, prêt à mourir. J'ai vomi. Au matin de la troisième journée la tornade a piqué plein sud, me laissant enfin tranquille. J'ai fait le tour du bateau, à part un mètre d'eau dans la cale apportée par les vagues et rapidement pompée, tout était en état. ( A suivre lundi)


mardi 10 septembre 2024

Un bol de lait créole (3)

 


Sur la plage ou je marchais depuis deux semaines, j'ai aperçu au loin un bateau. En m'approchant j'ai vu qu'en nageant un peu avec mon sac sur le dos je pouvais monter à bord. Une échelle de corde pendait le long du bastingage. J'ai attendu deux jours sur le sable, rien n'a bougé à bord. Alors j'y suis allé. C'était un petit bateau mais bien conçu, confortable, capable d'affronter la haute mer. Sur le pont deux cadavres se faisaient face. Deux hommes qui s'étaient mutuellement embrochés avec un harpon et une fourche. Ils étaient tous secs, momifiés. Pas lourds. Je les ai jetés par dessus bord avec la fourche. La cave était pleine de conserves, la réserve d'eau bien pleine, la cuve de carburant remplie à ras bord ; une croisière se préparait à l'évidence. Elle avait tourné court, et c'était mon jour de chance. J'ai branché la radio sur la batterie, les voyants se sont allumés, le haut parleur grésillait d'un canal à l'autre … Personne sur les ondes. Tant mieux ! Je n'aurai pas à refuser un appel au secours. 

(A suivre)


lundi 9 septembre 2024

Un bol de lait créole (2)

 

(Gonsalvez)

 

Toujours devant ! Au galop ! Foncer ! Prendre à peine le temps de sourire aux herbes ! Des rapaces me suivent de haut, je me demande qui attendent-ils ? Mon cheval ou moi ? J'ai soupiré en arrivant sur la plage. Le cheval épuisé tituba et s'effondra, mort … les vautours furent récompensés de leur admirable patience. Mes impédimenta s'étalèrent au sol aussi je n'ai gardé que l'essentiel. Il me fallut faire un tri brutal et abandonner le portrait de mon aimée morte du choléra du coté de Carpentras. Ma vie, dès lors, était devenue bizarre, j'avançais par pure habitude. J'avais pris l'habitude des cadavres partout, je m'étais même habitué à leur puanteur. Je savais qu'il ne fallait surtout pas les toucher. Je ne leur faisais donc pas les poches. Pourquoi faire d'ailleurs ? l'argent n'avait plus aucune valeur ; acheter quoi et à qui ? Que faire de bijoux et de lingots, il m'était arrivé de trouver un sac entier de pièces d'or, mais je cherchais de quoi manger moi !

Les gens étaient morts. Et les rares survivants évitaient de se croiser. Je voyais parfois au loin une petite famille, ou des femmes seules qui hurlaient, ou des hommes courbés furieux et armés. Il fallait éviter toute cette populace qui pouvait mourir soudain dans des spasmes en bavant une sorte de riz au lait. ( A suivre)


dimanche 8 septembre 2024

 



Un bol de lait créole (1)
(A.A)

Je crois que mon cheval ne m'aime guère. Je le vois dans son regard dégoûté quand il me fixe. Tant pis pour lui, moi-même je n'ai pas d'affection particulière à lui prodiguer. Il pue quand il sue, il défèque sans respect. Nous allons depuis des mois à travers ces pentes, sans rencontrer âme qui vive. Il est mangé par les taons et moi par les tiques, au moins nous avons cela en commun. Je vois bien qu'il se demande où nous allons. Que puis-je lui dire ? Je l'ignore moi-même. Nous allons plein ouest parce que j'ai appris jadis que c'est là-bas que la mer est. Je me dis que face à l'océan je verrai peut-être une vie, une voile. En tout cas il sera plus simple de scruter l'horizon, alors que dans ces monts perpétuels la vue est bloquée par des rochers immenses, sans cesse. Le soir le cheval broute et moi j'allume le feu, je bois du thé et mange des rongeurs piégés. La solitude est totale.

(A suivre)

samedi 7 septembre 2024

Reprise demain

 Demain le blog reprend avec une nouvelle qui s'appelle " Le bol de lait créole".  Un voyage lointain et bizarre et quatorze épisodes.



(Gonsalvez)

mardi 20 août 2024

Un peu de repos

 



Le blog ne va pas à la plage, mais il se repose quelques jours, profitez en pour vous assoupir aussi. Retour bientôt.

lundi 19 août 2024

Rêve inabouti

 


Quand j'étais bûcheron-débardeur en Ariège (dans ma jeunesse) j'ai souvent rêvé de faire, avec un copain, un mikado géant et déplaçant des grumes sans faire bouger les autres. Encore un rêve qui ne se réalisera pas.

dimanche 18 août 2024

Anecdote vraie

 

 C'était en Gâtine, pas loin de Parthenay. Nous habitions dans une vieille maison perdue, loin de tout. Derrière chez nous vivait un vieux couple, gentil comme tout. Depuis toujours l'homme et la femme dormaient dans des lits bateaux en bois séparés, dans la pièce principale ( la seule qui était chauffée). Le monsieur me racontait que jadis quand il avait envie d'un câlin il lançait sa casquette sur le lit voisin de son épouse. Si la casquette revenait : il restait dans son lit. "Sinon, je pouvais aller la chercher".

samedi 17 août 2024

La phrase romanesque

 Je parle souvent à moi même et il m'arrive parfois de me contredire et même de mentir.

(Balthazar Forcalquier)



jeudi 15 août 2024

J'ai de la chance j'habite à Thouars

 


A Thouars rien n'est comme ailleurs. Par exemple voilà un arrêté municipal pour dire que le stationnement est suspendu rue René Caillé, mais le panneau est installé dans une autre rue : la rue Bridier qui n'est pas concernée. Circuler à Thouars est toujours une charmante aventure. Pourquoi aller voyager ailleurs ?
 
Les chanceux habitent à Thouars  !

Le roi n'est pas notre cousin.

mercredi 14 août 2024

Tout y est

- Bonjour monsieur, avez-vous du Balthazar Forcalquier ?

- Bien sûr vous trouverez cela sous la 29e pile au fond à gauche à 28 cm du sol, 1.240e et 1.241e à partir du plafond. Prévoyez un casse-croûte et une après-midi libre. Sinon j'ai du Musso à portée de main.

Voilà tout.