mercredi 9 septembre 2020

Secousse (4)


    - Ceux qui composent cette étrange histoire.
    Ils sont six : Marie, Luc, Jean, Marc, Matthieu et Thomas. On va les suivre désormais dans le cheminement de leurs pensées et de leurs actions. -


Chapitre 4
Résumé : Au théâtre le souffleur avait des trous de mémoire,
on a été obligé de le licencier, mais il venait quand même,
il avait oublié qu'il ne faisait plus partie du personnel.

Ils étaient six (Marie, Jean, Luc, Matthieu, Marc, Thomas). C'est leur folle histoire qu'on va raconter ici. Tous les six se retrouvaient chaque vendredi au Café des Arts, à Thouars (tenu par un ancien para de la coloniale) ; puis selon la saison au bord du Thouet (par exemple l'été, dans la délicieuse prairie Michel Olivier. Quel bel hommage ! Avoir une prairie à son nom c'est mieux qu'un boulevard non ?) Ils se rassemblaient donc là, tous les cinq, quand les pêcheurs étaient partis vider un verre en rotant dans l'un de ces bistros à l'enseigne défraîchie dont le patron fatigué, levé depuis cinq heures (vendredi est jour de marché), disait en essuyant les tables sales avec un torchon sale : « Bon les gars, vous êtes bien mignons, mais, moi, demain je me lève tôt ; y a un super million et ça va gratter les grilles dès l'ouverture ! »
Ce à quoi les pêcheurs répondaient en cœur : « Les cons de pauvres ! Remets nous ça patron ! »
Les six amis se retrouvaient souvent aussi au restaurant « Le Trait d'Union » derrière l'église Saint-Médard, d'abord parce que la cuisine était parfaite, ensuite parce que le patron était aimable et portait des chemises extravagantes, et parce qu'enfin « Trait d'Union » était un nom qui touchait leur cœur.
Pourquoi ces six-là (Marie, Jean, Luc, Matthieu, Marc, Thomas) si différents étaient-ils ensemble chaque semaine ? Quel lien nouait leur vie ? C'est là le secret fou qui compose cette histoire d'autant plus incroyable qu'elle est possible !

Il y avait donc Marie, fantasque, qui buvait gaillardement pour faire la belle, et rentrait chez elle, flamboyante et seule. Belle certes, cultivée oui, mais affreusement seule comme au premier jour ; quand elle naquit et qu'elle découvrit qu'elle n'était pas sa mère, puis qu'elle était fille … et ensuite elle vécut tout ce cortège qui escorte les femmes … ces trucs qui obsèdent devant la glace… ces modes, ces sandales inconfortables, ces pinces qui tirent les cheveux, ces soutiens-gorge qui pincent, piquent, enferment. Ces trucs qui imposent des coquetteries et des faiblesses. Marie était le lien entre les cinq autres, comme la femme le fut quand elle mangea du fruit aux premiers temps, heureusement conseillée par le serpent, cet animal sage et sûrement pas fourbe (comme on veut le faire croire depuis plus de dix à quinze siècles avant Jésus Christ).

Si Marie eut des amants, personne n'en sut jamais rien. En tout cas ce ne fut ni Jean, ni Marc, ni Luc, ni Matthieu, ni Thomas. Cinq garçons qui la considéraient comme une sorte de divine révélation, hors de portée, pure et aimée.
C'est grâce à Marie qu'on apprit tout, car elle écrivit ces choses stupéfiantes dans un style net et précis, comme un coup de lame dans la gorge (ce geste de baïonnette qu'on apprend chez les paras pour éliminer sans bruit une sentinelle). Elle expliqua ce qui s'était produit, comment cela s'était produit, et surtout pourquoi cela advint. Elle était journaliste au Courrier de la République à la rédaction locale de Thouars, bien avant l'arrivée de Balthazar.
Son écrivain préféré était Claude Simon.
( A suivre)

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