"J'ai dit la vérité, je ne suis pas venue pour te duper"
Je retrouvai Blaise (Cendrars) au bistro, comme convenu. Il attaquait au blanc-citron-sucre et j’enchaînais. Comme je lui demandais des nouvelles de Woody (Guthrie) il répondit : "tiens le voilà ce bougre de compagnon".
En effet Woody poussait la porte de l'estaminet et nous rejoignit en commandant lui aussi
_ Un rince cochon Monique !
Nous buvions sec à l'époque, Blaise revenait de la forêt où il avait goûté à l'Ibadou l'herbe qui télétransporte, et Woody venait d'écrire sa 1.112e chansons. Il nous la chanta avec cette technique de guitare qu'il avait lui-même inventée, rugueuse et vive. Le refrain parlait d'un type qui avait perdu aux cartes après que sa femme fut partie avec un quincaillier ... enfin un truc comme ça.
Comme Julien (Gracq) passait sur le trottoir d'en face la tête dans les épaules nous le hélâmes ( j'emploie le passé simple pour lui faire plaisir).
Il déclina d'abord l'invitation et accepta finalement sur l'insistance de Blaise. Il commanda une tisane ( avec du rhum dedans), puis un vin cuit et ensuite un quart de chaume. Nous parlions de voyages et de Loire. Le temps qui passait était bon. Léonard (Cohen) toujours en retard nous rejoignit à la nuit tombée. Il était drôle vous ne savez pas combien.
Et François (Augiéras) plus fou qu'à l'ordinaire entra en vociférant, il était vêtu d'un court pagne. Dehors il gelait à pierre fendre.
La pendule avançait à tâtons.
_ Partons en bordée ! hurla Blaise. Il était 22 h 22. Je le suivis, nous prîmes un bateau dans un port sans nom. Il mit le cap au nord et nous débarquâmes en Sibérie. Ou bien il mit le cap au sud ... Je ne sais plus.
On est foutrement bien au paradis.
Voila c'est tout !
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